Catherine Blondeau, dirige depuis 2011 le Théâtre du Grand T à Nantes ; une programmation toujours très engagée ; son dernier ouvrage autobiographique « Blanche » en est la parfaite illustration.
Nous célébrons en 2021 les 20 ans de la loi Taubira reconnaissant l’esclavage comme un crime contre l’humanité ! Catherine Blondeau convoque donc les plumes caribéennes comme Césaire l’écrivain de la « Négritude », Glissant ainsi que Fanon qui après l’avoir lu l’amène à écrire « se retrouver seule au bord de la route sans être réconciliée avec sa blancheur ».
Parcours de vie de la Normandie à l’Afrique
Catherine Blondeau nous livre à travers ce récit autobiographique des pans importants de sa vie personnelle. Une jeunesse normande où le mot « race » était exclu et où elle croisait des maliens venus remercier leur père de leur avoir facilité l’embauche chez le constructeur automobile où il était contremaître.
Après une période consacrée à l’enseignement Catherine Blondeau est nommée en 1998 en Afrique du Sud comme directrice de l’Institut français à Johannesburg où elle constate « au quotidien que les traces de l’Apartheid suintent par tous les pores de la société sud-africaine et où la brutalité des rapports interraciaux est aussi symbolique que réelle.
Au contact de cette société l’autrice découvre ce qui la fait Blanche qu’elle le veuille ou non ! »
Culture Peul
Quelques pages étonnantes sur la polygamie dans la culture Peul, susceptibles de faire grincer des dents les lectrices des Impatientes de Djaïli Amadou Amalqui, prix Goncourt des Lycéens 2020 ; mais là encore l’absence de jugement et la réflexion de la part de Catherine Blondeau font la démonstration d’une belle intelligence.
Ouvrage éminemment politique
Lorsque l’autrice fait référence aux émeutes urbaines de 2005 en France elle avoue avoir eu du mal à respirer tout en voyant des « Blancs partout, qui ne sont pas beaux à voir… sans oublier les discussions à l’Assemblée Nationale sur les bienfaits de la colonisation et le débat sur l’identité nationale. »
Couverture
Remarquable esthétisme de la couverture, très riche en symboles! Extrait d’une œuvre d’une artiste née en Haïti Pascale Monnin!
Une lecture qui ne peut laisser indifférent
Aussi documenté que romanesque et musical, ce livre est remarquablement écrit, avec des courts chapitres qui offrent incontestablement un rythme soutenu et allègre.
Le style est vif, riche, sans concession, et toujours d’une grande profondeur emprunte de sincérité !
L’écrivaine fait preuve de cette rare capacité à se remettre en question, à effectuer une véritable introspection afin d’appréhender sa « blanchité »et la soumettre à l’épreuve des faits, des rencontres et de sa réflexion pour mieux comprendre le regard des autres.
Puisse cette autobiographie nous inviter à nous interroger sur notre histoire et peut-être ainsi fuir nos préjugés !
La question que nous souhaiterions poser à Catherine Blondeau en refermant ce beau livre serait de savoir si elle ressort apaisée de ce combat qu’elle mène avec elle-même?
Éditeur : Mémoire d’Encrier – 19 €