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Facel Vega : Les 4 cylindres

Il est clair que vu leur prix de vente et leur niveau de consommation, les grosses Facel V8 concernent, en dehors de quelques happy few hexagonaux, une clientèle majoritairement étrangère. Souhaitant toucher une clientèle véritablement française, Jean Daninos décide d’élargir sa gamme vers le bas.

Dévoilée en 1959, la Facellia répond à cet objectif avec pour mission de s’attaquer notamment aux Alfa Romeo et Porsche 356. Si son design reprend fidèlement le style de la HK 500, la voiture adopte le gabarit européen. En somme, c’est une HK en réduction.
La Facellia séduit le public lors de sa présentation, mais les clients vont vite déchanter. La fragilité du quatre cylindres Pont à Mousson, qui la motorise, va définitivement grever la réputation de la petite Facel. Elle entraînera même la chute de la firme, la prise en charge de la garantie coûtant une fortune à Facel. Lancée en 1963 avec la fiable mécanique Volvo de 1,8 litre, la Facel III arrivera trop tard.


Pourquoi ce moteur ?
Lorsque Jean Daninos cherche un moteur quatre cylindres pour sa future réalisation, il prend contact avec les différents constructeurs français. Mais il est éconduit par chacun des acteurs majeurs du marché français. Il tente alors de s’adresser à l’étranger, mais peine perdue, car l’Etat Français lui interdit de se fournir à l’étranger pour des moteurs sur des autos produites à des volumes conséquents. Le moteur devait donc absolument être français, en raison de prétextes “ franchouillards “ (mais sans mettre les moyens derrière évidemment !) et surtout pour les problèmes alors préoccupants de devises. En clair oui aux exportations qui ramènent des devises, et non à l’importation de moteurs qui vont nécessiter des devises. Pont-à-Mousson qui fournissait déjà d’excellentes transmissions à Facel Vega fut donc retenu, puisqu’ils possédaient dans leurs cartons une étude d’un six cylindres due à Carlo Marchetti. Il fut donc amputé de 2 cylindres et ramené à 1,6 litres de cylindrée.


Le cahier des charges de la Facel Vega Facellia reprend dans les grandes lignes les schémas de construction des grosses Facel Vega à moteur V8 : châssis tubulaire et coque soudée en acier, suspension avant indépendante, pont arrière rigide. Mais contrairement à ses sœurs à moteur V8, ses dimensions sont ramenées à des normes plus “ européennes”.


Les dirigeants de la marque avaient même tablé sur une production d’environ 2500 exemplaires chaque année (contre une centaine pour les grosses Facel à moteur V8). Environ 1000 commandes sont déjà enregistrées avant le démarrage de la production en chaîne.


La finition générale de la Facel Vega Facellia est soignée et originale. Ainsi, ses enjoliveurs réhaussent ses roues en tôle, et les bas de caisse en aluminium striés affinent la silhouette générale de la Facellia. Le tableau de bord dans le plus pur style aviation, cher à la marque, est intégralement gainé de cuir noir et les sièges sont formés de rouleaux de mousse. Le 28 septembre 1959, la Facel Vega Facellia est présentée officiellement sur la scène parisienne, au musée Jacquemart-André boulevard Haussmann. La presse et de nombreuses personnalités eurent alors l’honneur d’y assister. La Facel Vega Facellia s’offre un parrain de marque pour son baptême : Stirling Moss himself.


Les premières livraisons de Facel Vega Facellia interviennent à partir de l’été 1960, le type Mines ayant été homologué le 15 mars 1960. Les moteurs sont alors assemblés et testés sur banc à l’usine Facel de Puteaux, à partir d’éléments usinés chez Pont-à-Mousson qui fournit également la boîte complète. Le montage de la voiture se fait à Colombes et la peinture et la sellerie à l’usine de Dreux. Très rapidement les premiers utilisateurs des jolies Facellia doivent déchanter. L’empressement dans la conception de la mécanique Pont-à-Mousson n’a pas entièrement fiabilisé le quatre cylindres français. Les ingénieurs à l’usine doivent revoir leur copie en urgence, car le moteur souffre de nombreuses déficiences: un système de refroidissement insuffisant, des chemises humides résistant mal à l’usure et entraînant une consommation d’huile excessive, distribution difficile à régler, alimentation ayant nécessité le remplacement des deux carburateurs initialement prévus par un seul du type Compound,… C’est véritablement dommage car ce quatre cylindres, à défaut d’être fiable, est brillant à l’usage et convient à merveille à la petite Facellia.


Pour tenter de redorer le blason de la marque écorné par les problèmes liés au lancement de la Facellia, et bien que peu porté sur la compétition, Jean Daninos décide de réaliser une Facel de course à moteur central. L’objectif est de prendre part aux 24 Heures du Mans. Développé pour la circonstance, le V8 Chrysler de 6400 cm3 développe 465 ch à 6200 tr/mn. Il est accolé à une boîte de vitesses avec pont intégré dessinée en Italie. Equipée de freins à disques Dunlop, la voiture doit atteindre les 330 km/h. Hélas, le prototype ne pourra être terminé, il sera démonté et ses éléments mécaniques restitués aux fournisseurs.


Jean Daninos se retrouve acculé, car ses problèmes de trésorerie l’obligent à solliciter les banques qui lui refusent toute aide significative. Il doit alors accepter une intervention des pouvoirs publics dans son entreprise. Sous la pression du ministre des Finances de l’époque, Jean Daninos doit lâcher le pouvoir et de nouveaux actionnaires majoritaires sont nommés.
La trésorerie de l’entreprise ayant été engloutie en 1961 par le remplacement des moteurs de la Facellia, Facel est mis en liquidation judiciaire en juillet 1962.


Au salon de Paris 1962, Facel Vega présente sa Facellia avec de légères modifications qui entraînent l’appellation F2B. Les phares Marchal Megalux sont d’ailleurs montés en série. Au printemps 1963, après un assouplissement de la position du gouvernement français, Facel Vega stoppe la Facellia pour commercialiser la Facel III dotée d’un ensemble moteur-boîte Volvo. Exit donc le moteur maudit, mais la situation est désespérée…


Après un an d’administration provisoire, le liquidateur confie la société en location-gérance à la Sferma, une filiale de Sud-Aviation. Mais en octobre 1964, cette dernière se voit refuser de poursuivre la gérance par l’Administration. Jean Daninos tente alors une opération de dernière chance avec Rover qui aboutit à un accord, Rover envisageant de prendre le relais de la Sferma. Mais cette solution ne recevra pas l’aval des autorités.


Les Facel Vega seront exposées pour la dernière fois au salon de Paris de 1964. Toutefois, personne ne sera autorisé à prendre des commandes et la firme fermera ses portes définitivement le 31 octobre de la même année.

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